Sa boniche a écrit :
Firebat a écrit :La France a perdu sur les points faibles qu'on lui connaissait : adresse exécrable sur des tirs pourtant très faisables, défense naïve qui se fait transpercer comme un chalumeau dans du beurre dès que l'adversaire cherche à mettre le ballon dessous, que ce soit par du drive ou de la passe
Alors là, pas d'accord ! La France tient le 1er quart-temps avec son adresse à 3pts, au total ils font 8/23, exactement comme leurs adversaires. Les grecs ont plutôt bien défendu et n'ont pas ou peu laissé de positions ouvertes aux shooteurs. La France a l'habitude de dominer physiquement et la Grèce a su leur tenir tête dans ce domaine. Les français ont l'habitude de profiter de cette domination pour user leurs adversaires et pour trouver des paniers faciles à l'intérieur, ce n'était pas le cas.
Le match ne se perd pas en 1re mi-temps mais durant la 2e. Et je ne parle pas d'adresse à 3 pts, mais à 2 pts. Et en 2nde MT, elle a été catastrophique, avec pas loin d'une douzaine de tirs à 50cm du panier raté, et une bonne demi-douzaine de floaters. 2 ou 3 fois on a pu voir un lay-up suivi de 2 voire 3 rebonds offensifs ratés en 5 secondes. À 2 pts, Jeanne finit à 3/9, Gombauld à 4/12, Tchouaffé, Loubaki et Ntikilina à 5/18 cumulés.
Après de toute façon, comme dit ailleurs, Jeanne rend 40kgs à ses vis-à-vis, et ça y a pas grand chose à faire, faut faire avec, donc forcément au moindre contact dessous il explose. Ça a été le cas tout le temps sur le championnat. Gombauld également a explosé face à Papagiannis, alors qu'il était justement jusque là l'intérieur le plus solide, celui qui tenait le mieux au contact. Il y a une part d'impondérables également, comme ce manque de coordination sur des alley-oops manqués à cause de leur manque d'expérience...
Mais il n'y a pas que ça, il y a aussi une grosse part qui est simplement due au manque de rigueur et d'application. Une action plus particulière le revient en tête au moment où le match était dans la bascule à 5min de la fin, à 57-52, +5 pour la Grèce, : Charalampopoulos drive tranquillement à 45°, attire l'aide, et passe à Papagiannis démarqué ligne de fond, qui s'élève, se protège, et marque un panier avec la planche d'école, appliqué, rigoureux, avec un appui franc. À ce moment-là du match, Gombauld et Jeanne passaient leur temps à envoyer des bras roulés et des lay-ups à 50cm sur le cercle et dans les bras de Charalampopoulos, parfois plusieurs à la suite.
Globalement, et c'est un constat général qu'on peut souvent faire sur les équipes de France jeunes : j'ai bien trop souvent eu l'impression que les Français ont beaucoup plus de talent pur dans leurs équipes que leurs adversaires, mais que leurs adversaires sont au même âge beaucoup plus prêts à être des joueurs professionnels. Qu'au même âge, les joueurs français"jouent" au basket, avec beaucoup d'enthousiasme et de "plaisir de jouer" et prennent du fun à courir et laisser leur talent pur s'exprimer, là où les adversaire apprennent le métier de basketteur, avec beaucoup plus de rigueur pour accomplir les actions d'école basiques et sont plus prêts à être rentables rapidement dans un effectif professionnel. Je ne parle pas d'être un international en puissance, mais d'être la "cheville ouvrière" sur la banc d'une équipe random de championnat.
Toujours "globalement", c'est aussi un constat sur la capacité du basket français à faire en sorte que les potentiels s'accomplissent au lieu de rester des potentiels. À amener ces potentiels au niveau qui doit être le leur. Et ce n'est pas forcément un constat très reluisant. Je me souvient en particulier d'une génération, peut-être qu'elle m'a marqué plus que les autres, parce que je l'avais vue jouer un tournois amical à Limoges en préparation à l'euro U20 de 2007. Elle a été "oubliée" car éclipsée par la génération suivante des Diot, Heurtel, Batum, Ajinca, Moerman, etc., mais pourtant c'était une très forte génération, avec De Colo, Causeur, Curti, Aurélien Salmon, Aaron Cel, Marc Judith, Pape Sy, Medhi Cheriet, Martin le Pellec... Ils avaient joué contre l'Espagne, la Grèce et la Lettonie, et les avaient tous explosés d'une vingtaine de points. La différence en termes de talent pur était incroyable. C'était le jour et la nuit avec leurs adversaires. Dans l'équipe d'Espagne, les seuls extérieurs qui tenaient la comparaison par rapport aux extérieurs français, c'étaient Sergio Llull et Pau Ribas, et aucun leurs intérieurs n'avait le dixième du talent des intérieurs français. Dans l'équipe lettone, seuls Rihards Kusiks et Rolands Freimanis avaient pu exister par leurs talents de shooteurs (Kuksiks m'avait bien impressionné d'ailleurs). Quant aux Grecs, il n'y avait absolument personne pour rivaliser.
Et pourtant, là où on voyait que les Français s'éclataient, on voyait aussi que ceux qui étaient le plus prêts à être rentable immédiatement dans une équipe pro étaient les intérieurs grecs. Bien plus rugueux, bien plus prêts mentalement et physiquement à affronter des joueurs pro. Beaucoup plus prêts pour la compétition. Pareil dans une moindre mesure avec les Espagnols : là où on voyait et sentait que les joueurs français chercher dans leur attitude à s'éclater, les joueurs espagnols cherchaient dans leur attitude à être pro.
Au final, cette génération avait le potentiel pour prendre la 2e place, ils n'auraient probablement pas pu battre la Serbie de Teodosic, Tepic, Paunic et Stimac (ils en ont pris 15 contre eux en poule, d'ailleurs). Sauf qu'elle s'est effondrée en compétition et a fini à la 9e place. Et l'Espagne, à qui elle avait mis 20pts en amical, a fini 2e, menée seulement par Ribas et Llull, secondés par des coéquipiers au diapason, là où la France en terme de talent pur avait 4 ou 5 Ribas / Llull dans sa ligne extérieure.
Et pour en revenir à la question que je pose plus haut ("faire en sorte que les potentiels ne restent pas que des potentiels", faire en sorte qu'ils deviennent des joueurs de haut niveau européen), c'est là qu'il y a un problème en France. Sur cette génération espagnole, seuls Ribas et Llull se démarquaient. Et les 2 ont été amenés au haut niveau. L'un vient de se voir proposer 20 millions de $ par Houston, l'autre joue le top 16 depuis des années et est toujours à la limite de la Roja. L'Espagne a réussi a emmener 100% de leurs meilleurs prospects au haut niveau. De ce point de vue, on peut facilement faire la comparaison de ces deux-là avec De Colo et Causeur... Mais quid des Curti, Judith, Le Pellec, Sy... qui au même âge n'avaient pas grand chose, voir rien, à envier à un Ribas ? Sans même compter, à un autre poste, Cel et Salmon ? Aucun d'entre eux n'a vraiment atteint le haut niveau. Certes ils n'ont pas de quoi rougir (il faut être honnête, c'est rare que sur une génération autant de joueurs finissent par avoir une vraie carrière en pro A/B). Comment l'Espagne a fait pour que 100% de ses jeunes Ribas atteignent le haut niveau, alors que la France n'a amené que 25% d'entre eux à ce niveau, alors qu'ils partaient quasiment à égalité au même âge ?
Certes, il faut être réaliste, les prospects ne sont jamais que des prospects justement, il est utopique de penser qu'il sera possible que chacun d'entre eux accomplira son potentiel (y a qu'à voir le nombre de lottery picks à la draft qui n'ont jamais rien fait), mais malgré tout, le "taux de réussite" français pour faire exploser les meilleurs jeunes est bien faible. Il y a quasiment aucun doute que Charalampopoulos et Papagiannis auront vite leur chance au Pana et seront exposés au plus haut niveau européen. Tout comme Ribas et Llull l'ont eu à leur époque, et tout comme d'autre en Espagne l'ont eu avant, dans des clubs qui n'hésitent pas à responsabiliser tôt leurs meilleurs prospect. Il n'est pas anodin que sur la génération française dont je viens de parler, ceux qui ont atteint le plus haut niveau... sont ceux qui ont été responsabilisés tôt dans un clubs réputé pour sa formation et faire confiance aux jeunes (je parle évidemment de De Colo et Causeur).
Et le parallèle est facile à faire avec cette génération 97/98, car j'y vois beaucoup de points communs :
- beaucoup de potentiels avec un grand talent,
- une équipe capable d'en passer 30 face aux adversaires n'ayant pas les moyens de s'opposer physiquement (ils avaient battu la Hongrie et la Géorgie de 30 pts à l'euro),
- mais immédiatement en grandes difficultés dès qu'ils devaient faire face à une équipe qui, même beaucoup moins talentueuse, pouvait tenir la balle et tenir physiquement (défaites face à la Russie de Shved et Voronsevitch, face à la Slovénie de Preldzic et Vidmar, face à la Turquie dont le seul nom marquant était Savas)
- pour au final un résultat un résultat décevant en regard du talent à disposition, alors qu'en face d'autres équipes avec moins de talent pur, mais plus de cohésion et des joueurs plus prêts dans leur jeu et leur approche à affronter la compétition, continuent leur chemin.
Donc oui, il y a du talent. Mais comment faire pour que les Ntikilina, Loubaki, Tchouaffé, Ona Embo, Jeanne, Gombauld ou Tillie deviennent les nouveaux De Colo et Causeur, et non pas les nouveaux Judith et Salmon ? Dans l'équipe grecque, les talents sont limités en nombre et identifiés. Beaucoup moins nombreux qu'en France. Et pourtant, je suis à peu près sûr que dans quelques années ont retrouvera 100% d'entre eux dans le top 16 de l'EL, même s'ils ne sont que 2. Je suis par contre beaucoup moins sûr qu'on retrouvera ne serait-ce que la moitié de tous les Français que j'ai cité à ce niveau.