[topic unique] LIVRE

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On Cold Blood par Truman Capote

Déjà favorablement impressionné par ses nouvelles, j'ai voulu m'attaquer à l'oeuvre majeure de Truman Capote qui est un classique non de la littérature mais du récit journalistique transfiguré en oeuvre littéraire.

De quoi s'agit-il? D'un simple fait divers survenu au Kansas à la fin des années 50 dans le Comté de Wichita, une terre agricole, riche, prospère, on allait presque écrire heureuse. Un soir, deux hommes pénètrent dans une maison dont les occupants, comme tous les habitants de la petite ville ont laissé la porte ouverte tant ils sont confiants sur leurs voisins... Sans motif apparent, le mari, sa femme, leur fille et leur fils adolescents sont abattus de sang froid. Ils seront retrouvés baignant dans leur sang le lendemain matin dans leur maison demeurée ouverte, un dimanche, leurs amis s'inquiétant de ne pas les voir sur le parvis de l'Eglise....

Truman Capote expose ce fait divers tout au long de 500 pages où il va reconstituer méthodiquement absolument tout ce que l'on peut analyser d'un tel meurtre.... Sur ces dix dernières années, je dois avouer que ce bouquin est l'un des meilleurs que j'ai lus.

C'est remarquable dans la façon dont l'auteur déroule l'action, dont il ménage le suspense, dont à petite touche il commence à dresser le portrait de chacun des protagonistes, les meurtriers, la famille assassinée, les policiers en charge de l'enquête, les amis de la famille... Tout est remarquablement écrit pour intéresser le lecteur à cette histoire, l'amener à s'interroger sur les motivations du meurtre, se demander comment les meurtriers vont être arrêtés....

Mais au delà de la conduite du récit, ce qui est grandiose, c'est l'analyse de l'auteur. Là où plus haut on pleurait plus haut devant le manque total d'imagination d'une jeune écrivaine sur les motivations qui conduisent à tuer, le récit de Capote est implacable. A la lumière de sa plume, toute la personnalité des deux meurtriers est analysée. La part de préméditation, la part de crapulerie, la part de hasard, la part de bravache, le lecteur sort de ce récit avec tous les coups que l'on peut recevoir lorsque la part d'ombre de personnalités est ainsi mise à nue. On pourrait se moquer de passer ainsi des heures à décrire pendant des pages et des pages des personnages sans envergure, combien de centaines de crapules aux Etats-Unis ont commis des meurtres et dont nul ne retiendra rien si ce n'est, peut être un nom, au détours d'un article mièvre, mais ceux qui ont lu ou qui liront cet ouvrage ne pourront pas oublier Perry, Dick et la famille Clutter, ni le petit village de Holcomb.

Transcender le commun est la définition même de l'art et c'est ce que réalise Capote dans cet ouvrage magistral.
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Meursault, contre-enquête de Kamel Daoud

Petit roman ayant rencontré un succès public et critique lors de sa sortie.

C'est bien marketté, en ce sens que l'auteur se sert d'un des romans les plus lus et le plus aimés des Français, l'Etranger d'Albert Camus, pour imaginer une suite, en racontant l'histoire du frère de l'Arabe assassiné par le héros de Camus...

Je ne tiens déjà pas en grande estime le roman de Camus... Alors la suite... Je ne suis pas du tout rentré dans le livre... Il n'aurait pas été si court, je pense que j'aurais abandonné sa lecture...

Ce que je lui reproche? En fait, à l'exception de rares passages sympas, c'est l'histoire d'une déception. La déception de l'auteur pour l'évolution de son pays depuis l'indépendance, un rêve gâché... La faiblesse tient dans le fait que contrairement à un roman où c'est à travers l'évolution des personnages qu'on devine les travers d'une société et qu'on en parle dans l'histoire que l'on écrit, j'ai trouvé qu'il n'y avait que très peu d'épaisseur dans le portrait des personnages esquissés qui n'étaient juste qu'un alibi pour que l'auteur exprime ses frustrations. Or ce n'est pas ce que j'attends d'un roman, je ne trouve pas que ce soit le lieu pour retracer l'histoire d'un pays, d'une société... Ce sont encore une fois ce que les personnages traversent qui font l'état des lieux et qui permettent au lecteur de comprendre.... Là, c'est beaucoup trop descriptif, j'aurais dit "journalistique" dans le mauvais sens du terme, on est à des années lumière de la création romanesque d'un Tom Wolfe qui parle et en quels termes du New York des années Reagan....

Bref, si Meursault reste un personnage emblématique de l'absurdité du monde, le frère de l'Arabe assassiné ne devrait pas laisser beaucoup de traces dans l'histoire de la littérature....
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Message par chalon71 »

visiteur a écrit :On Cold Blood par Truman Capote

Déjà favorablement impressionné par ses nouvelles, j'ai voulu m'attaquer à l'oeuvre majeure de Truman Capote qui est un classique non de la littérature mais du récit journalistique transfiguré en oeuvre littéraire.

De quoi s'agit-il? D'un simple fait divers survenu au Kansas à la fin des années 50 dans le Comté de Wichita, une terre agricole, riche, prospère, on allait presque écrire heureuse. Un soir, deux hommes pénètrent dans une maison dont les occupants, comme tous les habitants de la petite ville ont laissé la porte ouverte tant ils sont confiants sur leurs voisins... Sans motif apparent, le mari, sa femme, leur fille et leur fils adolescents sont abattus de sang froid. Ils seront retrouvés baignant dans leur sang le lendemain matin dans leur maison demeurée ouverte, un dimanche, leurs amis s'inquiétant de ne pas les voir sur le parvis de l'Eglise....

Truman Capote expose ce fait divers tout au long de 500 pages où il va reconstituer méthodiquement absolument tout ce que l'on peut analyser d'un tel meurtre.... Sur ces dix dernières années, je dois avouer que ce bouquin est l'un des meilleurs que j'ai lus.

C'est remarquable dans la façon dont l'auteur déroule l'action, dont il ménage le suspense, dont à petite touche il commence à dresser le portrait de chacun des protagonistes, les meurtriers, la famille assassinée, les policiers en charge de l'enquête, les amis de la famille... Tout est remarquablement écrit pour intéresser le lecteur à cette histoire, l'amener à s'interroger sur les motivations du meurtre, se demander comment les meurtriers vont être arrêtés....

Mais au delà de la conduite du récit, ce qui est grandiose, c'est l'analyse de l'auteur. Là où plus haut on pleurait plus haut devant le manque total d'imagination d'une jeune écrivaine sur les motivations qui conduisent à tuer, le récit de Capote est implacable. A la lumière de sa plume, toute la personnalité des deux meurtriers est analysée. La part de préméditation, la part de crapulerie, la part de hasard, la part de bravache, le lecteur sort de ce récit avec tous les coups que l'on peut recevoir lorsque la part d'ombre de personnalités est ainsi mise à nue. On pourrait se moquer de passer ainsi des heures à décrire pendant des pages et des pages des personnages sans envergure, combien de centaines de crapules aux Etats-Unis ont commis des meurtres et dont nul ne retiendra rien si ce n'est, peut être un nom, au détours d'un article mièvre, mais ceux qui ont lu ou qui liront cet ouvrage ne pourront pas oublier Perry, Dick et la famille Clutter, ni le petit village de Holcomb.

Transcender le commun est la définition même de l'art et c'est ce que réalise Capote dans cet ouvrage magistral.
Faudra que je lis un jour ce roman. Ca a l'air très intéressant.
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Donne-nous ton ressenti quand tu l'auras lu :wink:
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Villa triste de Patrick Modiano

Longtemps j'ai voulu lire Patrick Modiano... :wink: Auteur contemporain ayant véritablement une épaisseur, un lectorat, une critique élogieuse... Trop de choses à lire avant.... Lorsqu'il obtint le Prix Nobel en 2014, je fus à la fois tenté de découvrir son oeuvre et un peu gêné de le faire à cette occasion, le Nobel ayant récompensé tant d'écrivains sans véritable talent... Je ne connaissais finalement de Modiano qu'à travers le fait qu'il était l'auteur du scénario du très controversé Lacombe Lucien, film de Louis Malle réalisé au milieu des années 70 et pour lequel j'éprouve une véritable tendresse comme pour toute la filmographie de ce très grand cinéaste.

Pourquoi avoir choisi Villa Triste dans une oeuvre aussi foisonnante? Pas de raison véritable, peut être de prendre l'écrivain au début de sa création et de ne pas commencer par un livre primé....

De quoi est-il question dans ce livre? D'un adolescent qui a peur... On se situe au début des années 60, la fin de la guerre d'Algérie rend la situation tendue, Victor Chmara quitte donc Paris pour trouver refuge dans une petite ville d'eau au bord du Lac Léman où la proximité de la Suisse semble représenter pour lui un refuge idoine. Villa Triste est l'histoire des quelques mois que va passer ce garçon dans cette petite ville, des personnages qu'il va y rencontrer, des liens qui vont se tisser entre eux, de la partie mystérieuse de leur existence qui échappe au jeune adolescent et du retour bien des années plus tard de l'adolescent devenu adulte dans cet endroit temporaire.

Ce qui est frappant et que je n'ai pas réussi à cerner à la lecture de ce premier ouvrage, c'est la façon dont est happé dans le monde de l'écrivain. Un monde très particulier au charme indéfinissable qui ne réside pas particulièrement dans un style mais plus dans le rythme de sa phrase. Une façon de plonger son lecteur dans un univers flou, où les personnages semblent flotter, où rien de définitif ne semble devoir s'inscrire. Où le champ des possibles semble infini et où pourtant il semble qu'ils n'arrivent pas à échapper à une certaine prédestination inscrite dans leur caractère, leurs premières expériences et le regard que porte sur eux l'entourage auquel ils semblent ne pas vouloir échapper....

Villa Triste est un roman au charme étrange, le roman d'un très bon écrivain ayant un univers original qui donne l'envie de poursuivre la découverte de son oeuvre.
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Message par Gavia arctica »

visiteur a écrit :Meursault, contre-enquête de Kamel Daoud

Petit roman ayant rencontré un succès public et critique lors de sa sortie.

C'est bien marketté, en ce sens que l'auteur se sert d'un des romans les plus lus et le plus aimés des Français, l'Etranger d'Albert Camus, pour imaginer une suite, en racontant l'histoire du frère de l'Arabe assassiné par le héros de Camus...

Je ne tiens déjà pas en grande estime le roman de Camus... Alors la suite... Je ne suis pas du tout rentré dans le livre... Il n'aurait pas été si court, je pense que j'aurais abandonné sa lecture...

Ce que je lui reproche? En fait, à l'exception de rares passages sympas, c'est l'histoire d'une déception. La déception de l'auteur pour l'évolution de son pays depuis l'indépendance, un rêve gâché... La faiblesse tient dans le fait que contrairement à un roman où c'est à travers l'évolution des personnages qu'on devine les travers d'une société et qu'on en parle dans l'histoire que l'on écrit, j'ai trouvé qu'il n'y avait que très peu d'épaisseur dans le portrait des personnages esquissés qui n'étaient juste qu'un alibi pour que l'auteur exprime ses frustrations. Or ce n'est pas ce que j'attends d'un roman, je ne trouve pas que ce soit le lieu pour retracer l'histoire d'un pays, d'une société... Ce sont encore une fois ce que les personnages traversent qui font l'état des lieux et qui permettent au lecteur de comprendre.... Là, c'est beaucoup trop descriptif, j'aurais dit "journalistique" dans le mauvais sens du terme, on est à des années lumière de la création romanesque d'un Tom Wolfe qui parle et en quels termes du New York des années Reagan....

Bref, si Meursault reste un personnage emblématique de l'absurdité du monde, le frère de l'Arabe assassiné ne devrait pas laisser beaucoup de traces dans l'histoire de la littérature....

Bon ben j’le lis parfois dans le Point et j’hésitais à lire son Camus inversé...et c’est vrai qu’il est devenu un icône médiatique, ce qui n’est jamais bon signe...donc j’hésite plus...:mrgreen:

PS l’étranger c’est le plus grand roman philosophique jamais écrit...
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Message par Gavia arctica »

je lis les 21 leçons pour le XXIè siècle du philosophe israëlien Yuval Noah Harari, après avoir lu Sapiens et avant de lire Homo Deus...

tout d’abord un avertissement: quand un mec devient le philosophe à la mode des médias et des grands de ce monde, il faut se méfier...mais quand même, y a à apprendre...

tous les imbéciles de la planète devraient lire ce type d’ouvrages...ils sont faciles à lire et à comprendre, et ils mettent bien en perspective ce que nous sommes, dans quel monde nous vivons vraiment, quelle est notre histoire et à quoi pourrait ressembler notre futur...je ne suis pas forcément d’accord avec l’avenir ultra technologique asservissant (mais rassurant???) pour l’homme qu’il nous prédit - en tous cas moi je le combattrais au nom d’une liberté qu’on nous enlève petit à petit à coup de videossurveillance, no cash, voitures autonomes, drones et capteurs santé - mais si on n’est pas conscient de cette évolution potentiellement dangereuse pour l’humanité, créant peut-être des humains à deux vitesses (immortels et mortels) qui feront passer les malaises de gilets jaunes pour des enjeux de bac à sable...

en tous cas plus intéressant que n’importe quel programme télé ou jeu de console...:mrgreen:

PS je viens de finir un bouquin suédois sur l’histoire de la Suède « Les Suédois et leurs pères ces dernières 11 000 années » sous un prisme d’analyse d’ADN retrouvés sur le sol suédois ainsi que sur les analyses récentes faites par nos contemporains...c’est incroyable ce qu’on peut dire sur la vie d’un humain avec les restes de son cadavre vieux de 5000 ans ou plus...bien plus parlant que sa/ma page facebook...:mrgreen:
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Gavia arctica a écrit :

Bon ben j’le lis parfois dans le Point et j’hésitais à lire son Camus inversé...et c’est vrai qu’il est devenu un icône médiatique, ce qui n’est jamais bon signe...donc j’hésite plus...:mrgreen:

PS l’étranger c’est le plus grand roman philosophique jamais écrit...
La philo n'a jamais été pour toi autre chose qu'un souvenir nostalgique de ta term où tu draguais les jeunes filles en fleurs, pas étonnant que Camus soit ta référence absolue vu le temps qu'il faut pour en faire le tour.... :mrgreen:
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Message par Gavia arctica »

...surtout que ça marche encore...avec les fleurs fanées...:mrgreen:
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La Supplication par Svetlana Alexievitch

Je pensais à un bouquin léger à lire sur la plage ou ailleurs pendant les vacances, j'ai pas trouvé mieux... :mrgreen:

J'ai entendu parler de cet écrivain lors de la remise du Prix Nobel en 2015. Comme ce que j'ai lu à l'époque était plutôt élogieux et que j'ignorais tout d'elle, j'ai voulu voir ce qu'il en retournait en lisant ce récit... Me faire une idée...

Je ne me suis pas beaucoup intéressé à Tchernobyl... De près.... Je n'ai pas trop cherché à voir les reportages télévisés diffusés, ce qu'on voulait laisser voir, année après année, sur ce qui reste encore à ce jour comme le plus grave accident nucléaire mondial. Certains ont sans doute été plus curieux que moi et n'apprendront peut être pas grand chose sur ce qui est décrit dans ce livre.

Moi je me faisais une idée, une représentation de ce que ça pouvait être... Svetlana Alexievitch m'a donné quelques idées plus claires sur la question... Sur l'accident lui même, la façon dont ça s'est passé, l'inconséquence totale des autorités de sécurité, la naïveté et l'impréparation des populations à faire face à ce genre d'accident. Elle parle aussi du mensonge, de la désinformation, de la non information, est-on sûr que celle-ci n'est liée qu'à un régime communiste finissant?...

Elle parle de Tchernobyl dans le temps, sur les décennies qui ont suivi, sur le regard des populations voisines, sur les conséquences sur la nature, sur les animaux, sur les enfants, sur les êtres humains, sur la société qui n'est plus communistes, sur l'URSS qui n'existe plus et où les territoires s'appellent Ukraine, Russie, Biélorussie...

Elle le fait en faisant parler ceux qui étaient là, avec leurs mots qu'elle transcrit dans un style sobre, sec, sans ménager son lecteur, en laissant sous le style intacte l'émotion des témoins dont la vie fut bouleversée, qui ont perdu des proches, qui eux même furent affectés, mais sans pathos, essayant de laisser le témoignage le plus proche possible de leur ressenti, de ce qu'ils ont vécu.... Certains sont insoutenables, je pense à celui qui ouvre le récit et celui qui le clôt, il faut vraiment être solide pour aller au bout de ce qui est décrit. Ce n'est pas du roman, c'est du vécu, du tangible, de l'insoutenable...

Svetlana Alexievitch a reçu le Prix Nobel car son oeuvre parle de la société communiste avec paraît-il beaucoup de vérité. En ce sens ce qu'elle décrit de l'accident nucléaire va bien au-delà de la problématique d'une société communiste même si elle est partie intégrante. Ce livre est un recueil de témoignages, guidés, montés par l'auteur, qui n'essaye pas de faire le bilan exhaustif de l'évènement, mais essaye d'en retranscrire les aspects les plus marquants.

Je ne sais pas si la Supplication est dans la ligne du reste de son oeuvre, il faudra que lise d'autres recueils pour me faire une idée, mais la Supplication fut un point d'entrée important, qui donne envie de poursuivre et laisse une trace dans la mémoire.... Celle d'une humanité souffrante, désemparée face à l'innommable, ne pouvant dépasser le souvenir du drame inscrit dans le cortex cérébral qui tourne en rond dans l'esprit de ceux qui étaient là à ce moment là et le restituent comme s'il avait eu lieu hier....
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Les Aventures de Huckleberry Finn, l'ami de Tom Sawyer de Mark Twain

Si le premier roman de Twain fut celui de l'espièglerie, de la fin de l'enfance, d'une création faite somme toute de pas mal de petits épisodes humoristiques conduisant à faire un roman, celui-ci est tenu pour le grand roman du Sud américain, celui d'un écrivain loin de sa maturité mais que sa première œuvre a permis de lui donner quelques assurances sur qualité de création et qui s'attaque dans celui-ci à sa terre, dans toute sa complexité et sa dimension sociale.

Les héros ont un peu grandi, sont devenus de véritables adolescents et commencent à appréhender le monde qui les entoure. En cernant évidemment la question raciale qui est centrale puisque l'histoire consiste à faire gagner à un Noir les territoires où il pourra se faire affranchir. Pour autant, ce n'est pas barbant, la force de création de Twain demeure magistrale, les personnages qu'il fait surgir sous sa plume sont parfois truculents, l'humour demeure très présent, mais l'œuvre est plus grave, plus profonde, la tragédie humaine plus présente même si elle n'est qu'en arrière fond inquiétant, pas dominante dans l'ouvrage.

Et bien évidemment il y'a le voyage. Sur le fleuve immense, avec cette description précise de ses îles, de ses affluents, de ses eaux, des bateaux qui circulent, des êtres qui s'y cachent, des villes parfois immenses qui s'y bâtissent, de cette sorte de frontière indéfinissable qui séparait le Nord abolitioniste du Sud esclavagiste. La façon dont Twain parle du Mississipi, ses descriptions sont une part prépondérante de la réussite de l'œuvre, le fleuve est le personnage central de l'œuvre de Twain, sa présence est obsédante, il est partout au point qu'il semble symboliser à lui seul l'identité du Deep South...
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A son image de Jérôme Ferrari

Publié l'an passé à l'époque où la liste du Goncourt sortait, il est probable que l'ouvrage de Ferrari aurait eu ses chances s'il n'avait pas déjà été primé en 2012.

C'est un très beau roman où j'ai eu plus de difficultés à rentrer que dans le Sermon car la forme est plus complexe. Il s'agit en fait du portrait d'une jeune femme qui se tue en Corse en accident de voiture et dont l'auteur va essayer de retracer sa brève existence. La femme étant photographe, le livre se présente comme une galerie de photos, douze au total, où le puzzle s'assemble doucement pour reconstituer ce qui aura été une vie, mais plus encore ce qu'a été le cadre historique d'une génération, celle de l'auteur, née à la fin du baby boom.

Le livre avance par petites touches, au fur et à mesure que les photos défilent… Une adolescence marquée par un amour corse, où l'auteur s'adonne à une férocité corrosive sur les mouvements nationalistes des années 80, un amour pathétique suivi d'une tromperie assez classique, le temps qui s'écoule, la difficulté à s'insérer, la prise de conscience de ce qu'est la guerre, la vraie, pas celle des scènes de théâtre ridicules des nuits blanches corses avec la découverte in situ de la dislocation yougoslave…

Ce que j'apprécie particulièrement chez Ferrari, outre sa qualité de style, c'est la façon dont il arrive à construire des personnages ayant une véritable consistance, qui dépassent leur propre moi pour raisonner sur l'ensemble d'un portrait de génération. On peut tordre le nez au fait que dans chacun de ses romans la Corse soit aussi présente, comme s'il n'arrivait pas à échapper au cadre dans lequel il a ancré son existence et dont chacun des héros qu'il crée est issu, peut être une façon pour lui de s'identifier à eux. La présence aussi du religieux, assez rare dans la littérature du moment qui contribue peut être à donner une profondeur à la réflexion. Enfin et surtout, cette part d'humanité très présente dans chacun de ses livres, en dépit de la causticité en arrière plan, humanité qui contribue à l'attachement que l'on peut avoir pour les personnages par la fragilité qu'ils démontrent face à un monde auquel ils aimeraient bien donner un sens mais qui n'est pas celui qui leur convient..
Modifié en dernier par visiteur le mar. 15 oct. 2019 23:34, modifié 1 fois.
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Oui Oui et la méchante sorcière.
Chef d œuvre absolu.
Qui l a lu ?
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Oui Oui et la méchante sorcière chef d œuvre absolu.
Qui l a lu ?
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7 par Tristan Garcia

Primé par le livre Inter 2016, chose logique dans la mesure où le petit gaucho de la Badiou's team de la rue d'Ulm ne pouvait qu'être adulé par un jury composé des auditeurs de la radio la plus communiste qui soit à l'exception sans doute de ce que l'on diffuse à Pyongyang, Pékin, Caracas ou la Havane… :mrgreen:

Plaisanterie à part, Tristan Garcia est un écrivain sérieux qui ne met pas spécialement en avant son idéologie dans ses œuvres contrairement à son jeune confrère Edouard Louis, c'est peut être pour ça qu'il a un talent certain…

Néanmoins, comme lors de son précédent roman "Faber", j'ai trouvé l'ensemble assez irrégulier… Sans doute dû au fait que l'auteur a fait montre de qualité créative en composant son roman de façon originale: 7, c'est en fait le nombre d'œuvres contenu dans le livre, 6 nouvelles et un roman final qui reprend l'ensemble des thèmes des nouvelles.

Or les nouvelles m'ont laissé sur ma faim, mis à part "Sanguine", que j'ai trouvé très poétique et sans doute aussi "l'existence des extraterrestres", belle exploration d'où une idée fixe peut vous mener lorsqu'on la pousse à son terme… En revanche, les deux premières m'ont vraiment laissé sur ma faim, d'où la difficulté que j'ai eu à rentrer dans cette œuvre, et "la révolution permanente" ne m'a paru n'être qu'un vague traité sociologique bien mièvre, franchement on comprend que Billancourt ait disparu si même les tenants de la cause n'arrivent plus à porter le moindre enthousiasme sous leur plume… Où est le successeur du Hugo des barricades parisiennes, ça avait du souffle bordel! Même si pour être juste, il s'agit justement de démontrer la bérézina du parti depuis la chute du mur et de la fin de cette religion...

Le roman lui se laisse plutôt bien lire… Sorte de traité non sur l'immortalité, mais sur la conscience de ce que l'on pourrait réécrire de ses existences précédentes si on devait les refaire et que cette opportunité nous soit donnée… Fantasme dont la vacuité est parfaitement bien orchestrée par l'auteur de mon point de vue…

Se détache de l'univers de Tristan Garcia un goût prononcé pour le fantastique, sur l'analyse du contemporain, mais je le trouve plus brillant dans sa création purement artistique que dans l'analyse prosaïque de son époque… Peut être tout simplement parce que je ne la partage pas...
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